Cordonnier mal chaussé…

L’année scolaire est terminée depuis quelques semaines et je fais l’autopsie de mes derniers mois en tant que professionnelle du milieu scolaire, mais aussi en tant que mère d’adolescents. On le sait, la fin de l’année scolaire 2019-2020 ne fut pas de tout repos pour tout le monde. Que l’on soit parent ou intervenant dans le milieu scolaire, nous avons dû nous adapter rapidement aux nouvelles mesures mises en place par le gouvernement. Il y a eu des cris de panique à l’idée de tout devoir concilier : travailler ou enseigner de la maison en compagnie des enfants (garderies et écoles fermées), superviser les travaux des enfants, continuer de cuisiner et de faire les tâches ménagères tout en étant maman/papa, conjoint/conjointe, etc. Je crois sincèrement que les soupirs de soulagement sont venus à la toute fin de cette épopée qui aura duré plus de 3 mois. Enfin libérés des réunions Zoom et Meet de ce monde. Enfin libérés des horaires parfois surchargés de notre progéniture. Et enfin libérés de la culpabilité de ne pas tout faire ce que l’école demandait de faire… Comme enseignante, je pense que j’ai donné mon 110 % tous les jours, mais comme maman… Le bât blesse un peu.

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Crédit : École photo créé par freepik

Cette année, ma grande fille terminait sa 5e secondaire. Dire qu’elle avait hâte de vivre la remise de diplômes et la soirée du bal est un euphémisme. Finir son secondaire de cette façon, personne ne l’avait vue venir celle-là. Alors quand les enseignants du secondaire se sont mobilisés pour offrir du soutien aux élèves, j’étais contente de savoir que les élèves, dont ma fille, auraient de l’enseignement jusqu’à la fin. Je pensais sincèrement que ce serait facile, mais il faut croire que j’étais bien naïve de croire ça… Ma fille a commencé à faire quelques heures de plus à son travail puisqu’elle n’avait pas des cours tous les jours. J’étais d’accord, mais toujours en disant que les études primaient sur le travail. Quelques heures de plus, ce n’était pas si mal. Tant qu’elle arrivait à gérer son horaire, je ne disais rien. Le moment où j’ai commencé à grincer des dents fut quand elle avait un horaire d’un peu plus de 30 heures semaines. Wô ! Là, je me suis dit qu’une bonne discussion s’imposait avec ma grande. Les études, c’est archi-important pour moi. Pas question de ne pas assister aux cours à distance et de ne pas faire les travaux demandés. Non, mais, je suis enseignante quand même ! Des discussions enflammées, il y en a eu. Beaucoup même. Je me sentais vraiment mal à l’aise à l’idée qu’elle préférait travailler au lieu d’étudier. Ses raisons : elle est une excellente élève avec des notes toujours dans le top, elle a été acceptée au Cégep de son choix en anglais en plus, elle aime aider les autres et évidemment, elle fait de l’argent. Quoi dire après ça ? Je ne pouvais tout de même pas l’enchainer devant son ordinateur… À quelques reprises, ma fille s’est installée à son bureau avec l’intention d’écouter ses enseignants, mais lorsqu’elle a réalisé que c’était surtout du rattrapage, elle ne se sentait pas concernée. À la limite, je peux la comprendre. Quand tu réussis très bien et que tu comprends très vite les explications, tu n’as pas le goût de perdre ton temps. Après plusieurs, mais plusieurs conversations où le ton a monté, j’ai abdiqué. J’ai choisi de lâcher-prise sur quelque chose dont je n’avais pas le contrôle. À presque 17 ans, je pense qu’on est capable de prendre des décisions et d’accepter les conséquences de nos actes. N’empêche que pour la maman enseignante-orthopédagogue que je suis, j’ai trouvé cette situation très difficile et embarrassante. J’étais gênée de dire que ma fille ne faisait presque rien. J’étais mal à l’aise en tant qu’enseignante : j’avais peur d’être jugée. J’avais peur que l’on me reproche de ne pas faire ma job de maman comme il faut, surtout que je suis dans le milieu scolaire. Pourquoi l’avoir laissée faire ? Pourquoi cautionner ces agissements ? Peut-être aurais-je dû tenir mon bout, c’est vrai. Mais au final, je crois que ma fille a beaucoup appris sur le monde du travail. Elle a compris qu’il est souvent ardu de concilier le travail, la famille et les amitiés. Elle a compris qu’elle avait des aptitudes de leader (elle a d’ailleurs monté en grade), mais surtout, je pense qu’elle a appris qu’elle pourra toujours compter sur nous pour la soutenir dans ses projets.

 

Et vous ? Avez-vous parfois l’impression d’être un cordonnier mal chaussé ?

 

Article rédigé par Carolyne Soulard

@SoulardCarolyne

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